Jour pour jour, il y aura quarante et un ans,
Je passais la porte en laissant derrière moi
Mon adolescence du haut de mes dix-huit ans
Toi, tu étais déjà une dame d'un certain âge,
Pour ne pas dire, excuse-moi, d'un âge certain,
Moi, un jeune freluquet prêt pour ce mariage,
Je ne prétendais pas dépasser les noces d'étains.
On s'engageait pour une durée indéterminée.
Entre nous deux, il n'y avait rien d'équivoque,
À mes vingt ans, je mis un petit coup de canif,
Une petite année sabbatique sous les drapeaux.
J'avoue ce flirt aurait bien pu devenir définitif,
Mais au calot, je préférais porter le chapeau.
Dans tes bras, tu me repris, on remit le couvert.
Au service contrôle, je regagnai donc les rangs.
Je découvrais ta complexité et tous tes revers,
Ton commerce devint vite pour moi enivrant.
Bec et ongles, pour sûr, je défendais tes intérêts,
Plus d'une fois, je te dois mes nuits d'insomnie,
Mais pour tout ce que j'ai fait, je n'ai aucun regret,
Entre nous, loin de nous l'ennui, la monotonie.
Avec toi, je peux dire, j'ai connu la belle époque,
Mais j'ai aussi enduré des moments épiques,
Et puis quelques coups de gueule réciproques,
Les petits heurs, qui font la routine domestique.
Certains de mes efforts sont restés illusoires,
J'attends encore ce petit merci qui encourage,
Mais avec le temps tout çà devient dérisoire,
À mon âge, je ne vais pas faire des enfantillages.
Pour moi l'heure était venue de rendre les armes
Sur toi les années n’avaient pas déposé une ride,
Des deux, oui, c'est moi qui versai une larme
Sur le temps passé ; en vérité c'est lui qui décide.
Non, je ne t’ai pas quittée dans l'indifférence,
Même si la retraite c'était un peu une délivrance.
Il était temps pour moi de tirer ma révérence.
J’attends encore les gages de ta reconnaissance.
De cette laborieuse aventure au long cours,
Il me reste des visages, des sourires, des amitiés.
Nos routes se sont séparées pour toujours,
Mais je n’ai rien oublié de cette vie partagée.
À voir aujourd’hui ta toute nouvelle destinée
Je me dis combien j’ai bien fait de te quitter.
Pour divergence, tu aurais fini par me répudier,
Pour preuve de ton ingratitude, je suis déjà oublié.
Adieu, donc !
Sans te ranger vraiment tout au fond d’un tiroir,
Je vais maintenant poursuivre sans toi mon histoire,
Prendre au gré de mes flâneries un nouveau chemin,
Pour vivre sous d’autres cieux la suite de mon destin.
Christian Bailly
Tous droits réservés
03/07/2014
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