jeudi 26 janvier 2017

Carpe diem


La muerte de Séneca. Rubens




Il y a les années que l'on compte,
Puis les années que l'on décompte,
Jusqu'à ce que, laissés-pour-compte,
La vie, à l'inévitable, nous confronte.

Au temps qui passe, on ne peut rien changer,
Mais de nous, dépends comment traverser
Les années qui font et feront notre destinée,
En attendant ce funeste dessein prophétisé.








À nous donc…


Annibal CARRACHE
Le Triomphe de Bacchus et d'Ariane



De ne point nous soumettre trop hâtivement,
D'apprécier intensément ce sublime présent,
Que nous accorde le temps, là, à cet instant.
À nous de vivre chaque seconde pleinement,
Et de croquer les fruits de la vie goulûment,
D'en savourer le jus, jusqu'au contentement.




Psyché surprend l'Amour endormi de
Lagrenée Louis Jean François








De notre chance, soyons pleinement conscient,
Choisissons de vivre chaque jour intensément,
Comme si nous devions vivre éternellement.
Oublions cet injuste dessein qui nous attend,
De l'amour, profitons des délicieux tourments,
Et ne manquons pas de le rappeler souvent
À ceux qui, à notre cœur, sont très importants.










La joie du vin  - Hals






À nous de ne compter le temps qu'au présent,
Pour sûr, le futur sera ce qu'il sera bien à temps.
Oublions du passé tous les plus tristes instants,
Pour ne retenir que les plus riches moments,
Ceux qui peuvent nous procurer le contentement,
Ne point nous faire regretter d'être encore vivant.








Le printemps de Botticelli







Émerveillons-nous, autour de nous, de l'existant,
Le monde même déchiré est un enchantement,
Les oiseux, les fleurs, les rivières et les étangs,
Les prés, la mer, les montagnes, et les volcans,
L'Été, l'Automne, l'Hiver et puis le Printemps,
Les feuilles mortes, au soleil, les blés murissants,
Les gelées, la pluie, et dans les arbres, le vent,
Le nouveau-né innocent, la mère et son enfant,
Au clair de lune, des amoureux sur un banc.





Même si notre monde nous semble dément,
Il nous offre bien des raisons d'émerveillement.
Goûtons, partageons, jouissons de ses présents
Pendant qu'il est encore temps.
Sur notre bougie, le mauvais vent
Soufflera bien assez prématurément…

Sleep - Jean Bernard Restout

Christian Bailly
Tous droits réservés 
14/06/2012

A mon Grand Père



De lui, j'ai des images inoubliables.
Je le vois encore, là, assis à sa table,
Penché sur un roman, paisiblement
À lire, à prendre enfin son temps.

Ses mains marquées par les ans,
L'une sur l'autre, très sagement,
Attendaient de tourner les pages
D'un vieux manuscrit hors d'âge.




De ses bras encore très puissants,
Émanait la force d'un ancien titan
Qu'exigeait sa tâche de forgeron.
Du feu et du fer, il était le patron.





Son visage stigmatisé par l'ouvrage,
S'était finalement adouci avec l'âge,
Et sa jovialité effaçait la rudesse
De ses traits comblés de sagesse.





En lui, je ne voyais plus cette brutalité
Qui terrorisait mon enfance réservée,
Quand pris de fureur, il blasphémait,
Aux milliards de bons dieux, s'en prenait.


Je le regardais ainsi, assis à sa table,
Ce  vieil homme, à la vie honorable,
Il avait traversé la dernière guerre
Sans vouloir mettre le genou à terre,




À résister pour défendre sa liberté.
Il était rouge comme le sang versé
Par beaucoup de compagnons tués
Pour libérer leur France occupée. 


Un résistant discret sur sa bravoure,
À son enterrement point de discours,
Pour ce qu'il avait fait sans gloire,
Point question d'honneur ostentatoire.


Sur la vie, il avait sa propre vérité,
En politique, des idées bien arrêtées.
La vie avait forgé ses convictions,
L'athéisme était son unique religion.




En patriarche, il veillait son clan,
Mais n'était pas toujours conciliant.
Pour sûr, il était fort honnête homme,
Même s'il n'était pas gentilhomme.


À son Agnelle, il avait mené la vie,
Dure, mais à l'époque, c'était ainsi,
On ne faisait pas dans la dentelle,
Pour la bagatelle, pour l'existentiel.






Tous deux arrivaient, bon an, mal an,
À l'âge où, faute d'être tendres amants,
On conjugue vieillesse avec tendresse
Pour en oublier l'insidieuse détresse.




À le voir ainsi, assis à sa table, à lire,
Je saisissais ce que c'était de vieillir,
Je réalisais alors, du temps, la cruauté,
Ce que c'était d'être, et d'avoir été.




Et quand enfin, j'osai lui demander
Comment il occupait ses journées,
Il me répondit avec philosophie,
Dans un grand sourire, avec ironie.

"Eh bien, tu vois, j'attends la mort"

Christian Bailly
Tous droits réservés
10/06/2012

mercredi 25 janvier 2017

Le Forgeron




Je me souviens de mon enfance,
Où je rentrais avec prudence,
Mon Grand-père
Dans cette forge immense.
Je m'y sentais sans défense.

Dans un bruit infernal,
Le coup de gueule du maréchal
En train de chausser un cheval,
Au ventre, me faisait mal.

Pour moi, dans cet enfer
Où résonnait la voix du fer,
Je ne savais que faire,
Sinon…me taire

Fruits du métal en fusion,
Naissaient mille et une créations,
Les secrets de cette transformation,
Faisaient mon admiration.

J'admirais de ce lieu le maître,
Comme lui j'aurais voulu être
Celui qui peut connaître
La satisfaction de faire naître,

 De ses mains trapues,
De ses bras puissants et poilus,
Pics, fers et charrues,
Sur cette enclume lourde et charnue.

Au rythme du marteau pilon,
Sur elle, en duo, mais d'un seul ton,
Résonnait le vibrant flonflon
D'une sempiternelle chanson.

Après avoir tant vibré,
Le marteau, l'enclume,
Un jour se sont figés,
Pour l'éternité…
La porte s'est refermée
Sur cette forge du passé.
Mon cœur brisé a pleuré.

À mon Grand-Père

mardi 17 janvier 2017

Bonjour tristesse




Bonjour tristesse !
Je t'aime, je le confesse.
Avec toi pas d'histoire de fesses,
Un amour unique, sans  S.
Tu es Ma Comtesse.
Accrochée à mon esse.
Depuis ma tendre jeunesse
Jamais d'intensité, tu ne baisses.
Sur moi, tu as tissé ta tresse.
Pas un jour de paix, tu me laisses.
Tiraillé par toi sans cesse,
Mon cœur, par toi, se blesse.
Mon corps, ta tyrannie, encaisse.
Tu me dictes ta messe,
De ma vie, tu es l'abbesse.
Chaque jour un peu plus tu me presses.
De penser à toi, je n'ai de cesse.
Mais de cette idée, je me confesse,
Un jour viendra où je serais en caisse,
D'un autre, alors, cherche à devenir l'hôtesse,
Car je te dirai alors, Adieu tristesse !


Mark Ashkenaz - Joseph

Christian Bailly 
Tous droits réservés 

vendredi 13 janvier 2017

La lépreuse

Alors même que le jour et la nuit s'unissent,
L'aurore fugace naît d'entre leurs cuisses,
Les eaux perdues s'étalent sur la lagune,
Dans un bain de sang dilué par les brumes.

L’aurore et le céphale - Pierre-Narcisse Guerin



Une auréole couronne alors le nouveau-né,
Qui déjà fièrement s'élève d'entre les nuées.
Au loin, les cloches sonnent son avènement,
Appellent les hommes au divin rassemblement.

Lever du Soleil sur l'Océan - Vladimir Kush


Dans le jardin sauvage, la rose pleure de joie,
Merles et rossignols répondent d'une seule voix,
Sur l'étang, l'onde répand l'écho pâle du jour,
Les vapeurs de la terre s'échappent des labours.

Louise Girardin



Le monde s'éveille, s'émerveille d'être encore là,
S'étonne encore de ne point succomber au pugilat.
Mère nature vulnérable, à l'homme, cache sa joie,
Dissimule ses pleurs, ne se montre pas aux abois.

Rivières - Claude Monet Nature


Quand vient l'éclat du jour, de sa plaie béante,
Elle nous prouve combien son fils l'ensanglante,
À son sein asséché, les peuples affamés pleurent.
Devant son ventre déchiré, les enfants se meurent.

du net


Les nuits sans lune, pourtant, elle panse ses plaies.
Vaine peine, sur elle, s'étale l'indomptable ivraie.
Mère nature a la lèpre, le mal, partout, la ronge,
Désormais sa vierge beauté, n'est plus qu'un songe.

Incubus par Charles Walker



Au couchant, le soleil pleure des larmes de sang,
Dans lequel l'homme se baigne tel un innocent.
De son paradis, il en fait son imminent tombeau
Il endurera l'enfer avant de gagner son caveau.


du net



Antonio Zanchi


L'Indien Chactas sur la tombe d'Atala - Raynaud Auguste



Christian Bailly
Tous droits réservés
10/10/2012

jeudi 12 janvier 2017

La vie


Dorian Florez



Un jour d'été, ou un jour d'hiver,
Sans crier gare, te voilà sur terre.
Sans savoir vraiment pourquoi,
La vie s'offre à toi !

Te voilà, nu comme un vers,
Devant père et mère, fiers
De leur progéniture,
De ce cadeau de la nature.





Arthur Sarnoff











Sourires et pleurs,
Rythment alors tes heures,
En autant de biberons que de couches,
Tu découvres le monde avec ta bouche.














Inspired by  Jim Daly






Tu grandis comme la mauvaise herbe,
Te voilà déjà à l'école qui t'exacerbe.
Maternelle… Primaire… Secondaire…
Et à la fin, tout ça pourquoi faire ?
















Mais la vie ne s'apprend pas vraiment,
Elle se vit bon an mal an !
Un jour sirop, un jour ammoniac,
Souvent, on se prend des claques !




Meredith O’Neal








Puis vient la saison des amours…
Des engagements pour toujours…
On partage son destin, son lit,
En se disant, c'est pour la vie.
















Gustav Klimt 







Un jour d'été, ou un jour d'hiver,
Sans crier gare, le voilà sur terre,
Sans savoir vraiment pourquoi,
Sa vie s'offre à toi !

Le voilà, nu comme un vers,
Devant toi, tu en es fier
De ta progéniture,
De ce cadeau de la nature !









Bernard Buffet





Métro, boulot, dodo,
La vie apporte ses fardeaux.
Les années nous échappent.
La vie fallacieuse nous happe,








Steve Huston






Nous gratifie de coups de pied au cul,
Un jour, on avance, un jour, on recule.
On tombe parfois, et on se relève,
Un jour, un cauchemar, un jour, un rêve.










Steve Huston







On espère, on désespère...
La vie nous exaspère !
On vieillit, c'est la loi de la vie,
Quand d'autres meurent de maladie.















Vieillard nu au soleil - Marià Fortuny







On avance plus, qu'à petit pas…
Qu'en le temps lui court à grand pas.
De l'amour, il nous reste la tendresse,
Les souvenirs de nos ivresses…















Ary Scheffer - The Death of Géricault







Dans le silence, les heures passent,
À attendre que la mort nous terrasse
On se dit que la vie était un rêve,
Trop tard ! Un jour, on crève !









Un jour d'été, ou un jour d'hiver,
Sans crier gare, nous voilà en terre.

Coucher de soleil au cimetière




Christian Bailly
Tous droits réservés
08/10/2012