mardi 14 juillet 2020

Un autre monde

La verité amène la république et l'abondance -
Nicolas de COURTEILLE

Bourgeois !


Un jour, la terre tremblera


Sous le pas des pauvres,


Vampirisés par la cupidité,


Engendrée par le capital.


Un jour, la terre s’ouvrira,


Sous le poids de la misère,


Pour tous vous engloutir.


Un jour, la terre explosera,


Comme une bulle financière,


Fomentée par votre avarice.

Prise de la Bastille - Anonyme




Au silence des agneaux,


Raisonneront, enfin les pleurs


Des loups affolés et traqués.


Dans le courant d’une onde


Impure, l’issue fatale


D’une aventure hasardeuse.


Bourgeois ! Entendez la colère !


Politiciens ! Écoutez les plaintes !


Osez regarder la misère,


Toute la misère du monde.


Vos privilèges, au caniveau !


Un jour, la terre tremblera,


Sous le pas des parias,


Un autre monde émergera.


Vous n’en serez plus les rois,


Votre veau d’or déboulonné,


Vous n’aurez, alors, bourgeois,
Que vos yeux pour pleurer.



 Aux Sans-culottes
Aux femmes de Versailles


"Les Amazones de la Révolution "

Christian Bailly


Tous droitsréservés

29/03 2020


mercredi 1 juillet 2020

Cimetière marin




Au grès d'une promenade,

Sans dessein particulier,

Tel un rimailleur nomade,

Dans ma ville tant aimée.


 



Je me suis faufilé,

Comme un enfant curieux,

Dans ce haut lieu,

Chanté par un poète renommé,

 

Le Cimetière Marin…

Avec la mer pour seul horizon…

 

Paul Valéry, nous en fit l’éloge.

Méditation magistrale et sensuelle,

Réflexion sur l’immuable horloge,

Et nos pensées de mortels.

 



   De ces humbles mausolées,

Avec ma boite à images,

J’ai figé ce temps passé,

Dont nous sommes otages.

 




De ce balcon sur la mer, 

Toutes les âmes pieuses

Ont quitté cet ossuaire,

Pour une quête glorieuse. 




Entre l'horizon et l’azur,

Elles ont fini par trouver

Le chemin qui rassure,

De la paix et de l’éternité.

 


Tombeaux majestueux,

Sépultures somptueuses,

Pour les fins prestigieuses

De destins fabuleux.

 

 



D’ici-bas, à l’au-delà,

Soyons ce que nous avons été,

Semblent nous dire, tout bas,

Les résidents de ces mausolées.

 


Mais les rides du temps

N’épargnent pas la pierre,

Pluie, tempête et vent

Frappent ces illustres litières.



Tandis que là-bas, chante le merle.

Le vent emporte le souvenir de l’aïeul,

Les couronnes perdent leurs perles,

L'oublie devient leur ultime linceul.

 


Et toujours la mer pour seul horizon…

 

À l'ombre éparse des cyprès,

S’évapore, les larmes du chagrin,

Roulent, les fleurs desséchées

Jusqu'au bord du chemin.



Ici, anonymes ou sommités

Se côtoient pour l’éternité,

Leurs vies les ont tenus éloignés,

La faucheuse les a rapprochés.


 

Sur la pierre qui gît,

Les traces du recueil,

Le temps se languit,

De cet éternel deuil.



Roses pétrifiée pour immortaliser

Le souvenir d’une souffrance,

D’un amour jamais consolé,

Le deuil solennel de l’insouciance.


 

Sur…

Ces Vierges immaculées endeuillées par l’oubli,

Ces marbres lézardés par les griffes du temps,

Ces roses du souvenir, à jamais, endormies,

Ces chapelles outragées par les mauvais vents, 

 


Le gabian veille comme une sentinelle,

Sur le repos de touts ces âmes.

Deux colombes lancent leur appel

À la paix, sans rompre du lieu, le charme.


 


Et toujours la mer pour seul horizon…


 

Croix de pierres,

Croix en dentelles,

Croix de fer,

Croix immortelles.


  


Flèches dressées vers le firmament,

Comme les lances d’une armée,

Elles gardent ces gisants pétrifiés,

Et traversent la nuit des temps.


 

Sur la pierre blafarde des tombes immuables,

L’ombre et la lumière jouent au fil des heures,

À un cache-cache silencieux et imperturbable,

Oublieux des âmes en peine et des visiteurs.

 


Là, en pleine lumière, la pierre se dresse au soleil levant,

Ici, à l’ombre d’un cyprès, elle cache mal sa détresse.

Plus loin, patiente, elle attend les ors du soleil couchant.

Affligée par les ans, cette autre pleure ses lettres de noblesse.


 

Dans ce capharnaüm, d’augustes sépultures, 

 
S’enchevêtrent dans un agencement désordonné;

Qui, face à la grande bleue étalée dans sa démesure,

Qui, tournée vers l’occident, qui, vers l’orient sacré.

 

Ici, les places sont chères,

Sonnent les trompettes de la renommée !

Avec vue sur mer,

Pour le sommeil du juste, la panacée !



Et toujours la mer pour seul horizon…


 

Entre ces tombeaux,

Mes pas se perdent pour cacher

De mon âme damnée, son fardeau,

Sa quête désespérée.


 

Christ crucifié,

Christ gisant,

Christ décharné,

Christ consolant.






Christ rédempteur, sauveur des âmes

Bien nées, autant que les âmes déchues.

En chacun, brûle cette même flamme,

Dans son cœur, il n’y aura pas d’exclus.


 


À tous, la même charité,

Sa gloire pour l’éternité,

Un Eden à  perpétuité,

Une paix bien méritée.


 


Des petits anges, en éternelle prière,

Veillent dans un profond recueillement,

Regardent mourir les roses dans la lumière

Du couchant, sans un sourcillement.


  

 


Ils contemplent le temps qui passe,

Sur leur éternelle jeunesse,

Sans impatience, mais tenaces,

De la pierre, ils ont acquis la sagesse.

 

Dodo, l'enfant dort… Pour l’éternité




Emporté par son destin éphémère...

Douleur incommensurable,

Qui dévore le ventre de la mère,

Blessure inguérissable.


 

Perdre un enfant,

C’est perdre sa chair,

C’est perdre son sang,

C'est une plainte, qui ne peut se taire.

 

C’est partagé le sort de Marie…




La vie devient un purgatoire,

Un martyre sans issue,

Sans aucun exutoire,

À jamais, un destin déchu.

 

Et toujours la mer pour seul horizon…



Christ mortifié de fer ou d’or,

Elevé vers les cieux,

Ou gisant, il offre son corps,

Au temps irrévérencieux.





Dans son ultime martyr sans fin,

Il veille.

Du matin au soir, du soir au matin,

Il veille.

 


Sur ces âmes confiées par les hommes,

Sur leurs corps stupéfiés par la mort.

Ici, des pêchers, on ne fait plus la somme,

On repose, on oublie ce mauvais sort.



Dans la magnificence du soir,


Les ardeurs du couchant

Caressent sur son reposoir, 

Un catafalque impressionnant.




Il en impose de la puissance !

Jusqu’en ce lieu, le sens du devoir.

Dans sa grande éloquence,

La mort affirme son pouvoir.


 

Pour lui, la gloire et la postérité !

Qui pouvait être ce mortel

Pour mériter une telle piété ?

Quel amour au pied de cet autel ?




Le silence, pour toute réponse.

Riche ou pauvre, haï ou aimé,

Un jour arrive, la vie renonce,

Peu importe, le mausolée.




Cette enveloppe mortuaire

Ne change en rien notre état,

Calicot, lin ou soie pour suaire,

Pour tout mortel, même trépas.

 


Et toujours la mer pour seul horizon…



Bouquet de roses en faïence,

Pensées pétrifiées,

Figent  à jamais la réminiscence

D’un lointain passé.




À l’ombre d’un pin sans âge,

La panacée pour un repos perpétuel,

Une tombe profite de l’ombrage,

Se soustrait à l’astre solennel.




Des deux, qui était là le premier ? 

Peu importe son ombre sera appréciée

Par le parent ou le promeneur égaré 

Qui prendra le temps de méditer.

 

Quel sera son repos éternel ?

Le néant ou l’éternité ?

Poussière d’homme ou immatériel,

Profane ou bien sacré ?

 


Plus loin une allée aux tombes sagement alignées

Semble guider mes pas vers l'infini du couchant

À l’horizon, déjà, l’astre s’apprête à nous oublier,

Le crépuscule nous laisse encore un peu de temps.

 


Sur le champ de croix tournées vers l’ouest

Le soleil mourant dépose sa clarté pâlissante

Avant de sombrer sans que quiconque ne proteste

Demain sera un autre jour pour les âmes vivantes



Demain, après demain...

Son voyage toujours recommencé



Et toujours la mer pour seul horizon…




De ce balcon, avec vu sur mer,

Sous leurs yeux fermés par la faucheuse,

Le théâtre de la vie éphémère,

D’une humanité fataliste et laborieuse.

 

À ses pieds…

Furibonde ou apaisée,

La Grande Bleue déployée,

Berce nos âmes angoissées

Par un futur contrarié.


Alors,

Languissons-nous de bien vivre le présent…

 

Le temps sait où il se presse de nous emporter.

Quand le futur ne sera plus que languissantes douleurs,

Il sera bien temps de regretter ce présent passé,

Nous écouterons chaque battement de notre cœur,

 

Jusqu’au dernier…


Pour l’heure,

De mon regard d’enfant extasié,

J'embrasse l’immensité déployée,

Je m’imprègne de cette sérénité,

Elle apaise mes déloyales pensées.

 

La paix, peu à peu, envahit mon âme, 

Je reprends mon échappée vagabonde,

La vie, oui la vie, encore, me réclame,

Il est temps de rejoindre le monde.




Au loin, le soleil sombre flamboyant,

Dans les flots déjà obscurs et scintillants.

La lune, pâle, est déjà  à l’affût, au levant.

Au Cimetière Marin, la nuit des temps…

 

Et toujours la mer pour seul horizon…


Texte et photos (Sète) Christian Bailly

Tous droits réservés

19/06/2020