vendredi 22 juillet 2022

La fête au village

 

Christian Panis - Place du village

 

Pour nous, tout commençait un soir de semaine,

Au printemps, quand nous rentrions de l'école,

Le matériel de la rotonde arrivait, la bonne aubaine

Pour les gamins que nous étions, joyeux et frivoles.

 

Le lendemain, elle était debout sur la place,

Prête à accueillir nos jeux d'enfants inconscients,

Son plancher sur cales, à nos yeux trouvait grâce,

Le dessous devenait un terrain d'amusement.

 

Kokoschka


Nous nous faufilions comme des chats ensauvagés

D'un bout à l'autre, ignorant le danger existant.

Mais une fois que le reste des forains était arrivé,

Nous avions d'autres sujets de divertissement.

 

En quelques jours, sur la place, tout était installé.

Sur la droite, le manège prenait ses aises,

Sous les arbres un stand de tir pour les aînés,

Et une loterie, à ceux qui dédaignent, n'en déplaise.

 

Et enfin celui qui a fait de mon enfance, l'unanimité,

Les grandes balançoires "bateaux" à l'ancienne.

Je faisais mon bravache, quand je sentais mes pieds

Décoller du plancher, au-dessus de la fête foraine.

 

Nicodi - Fête forraine


J'avais la sensation de voler de mes propres ailes,

Pour un instant, loin de ce village pourtant rassurant,

De certains aspects de ma vie qui me paraissaient cruels.

J'oubliais le bâtard que j'étais pour les bien-pensants.

 

 C'est en fanfare que se faisait l'ouverture officielle,

Avec les quelques administrés du petit hameau.

Les enfants attendaient, impatients, la fin de ce rituel,

Pour se disperser comme une envolée de moineaux.

 

Le samedi soir, le bal musette ouvrait ses portes.

Des voitures, des scooters et autres engins motorisés

Arrivaient des alentours, en bruyantes  cohortes,

Pour oublier une semaine de labeur et s'amuser.

 

Bal-musette - Annie Desfrennes


Chacun y trouvait son compte, surtout les forains.

Ils retrouvaient leurs habitués chaque année.

Sur le parquet talqué, on se remettait dans le bain,

Qui pour un tango, un paso doble, qui pour valser.

 

Une fois tous les anciens rassasiés pour un an,

L'orchestre changeait de registre pour la jeunesse.

Les yé-yés prenaient d'assaut la piste, sur le champ,

Pour ne l'abandonner qu'au bout de leur ivresse.

 

Le-bal-des-nantis- Jean Mirre


Et tout recommençait, le dimanche après-midi.

Le manège ne savait plus où donner de la tête,

Il ne désemplissait pas, faisait le plaisir des petits.

Au tir, les hommes ne lâchaient pas la gâchette.

 

Jo Heliotrope - Fête forraine


La jeunesse des alentours était déjà sur les lieux,

Pressée de reprendre ses danses endiablées.

 Les anciens assagis de la veille, un peu envieux,

Se contentaient de partager un verre de l'amitié.

 

Samuel Veksler


Peu à peu, la place se vidait dans la soirée.

Le lendemain, il fallait bien assurer sa besogne.

Pas question du tout de rester au lit à fainéanter.

C'est sûr, au boulot, il y aurait eu de la grogne.

 

Les forains étaient sur le tas, dès le lundi matin,

À démonter manèges et stands, et à plier bagage,

Bon train, au grand désespoir de tous les gamins.

La fête était finie, il fallait descendre de son nuage…

 

du net


Christian Bailly

Tous droits réservés

17/07/2022

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