Au coin de la rue, tu étais là,
Rue Lepic, tout en bas
Que tu sois là ou absente
Personne ne semblait le remarquer
À part moi et tes habitués.
D'un blond cendré, sans maquillage
Extravagant comme le veut l'usage
Sans tenue outrageante,
Ni pose provocante,
Ton corsage légèrement ouvert,
Été comme hiver
Laissait entrevoir la naissance
De tes seins, sans indécence,
Savamment cachés
Mais discrètement avantagés.
Ta jupe courte, mais pas trop
Aguichais les matelots
Et laissait apprécier
Tes longues jambes fuselées.
Georgy Kurasov |
Et mesurais le temps au nombre
De mégots abandonnés à tes pieds
De talons aiguille chaussés.
Pour moi, tu n'étais pas Carla
Ni Lisa, mais Natacha
Tu m'inspirais les terres de l'Oural
De la Russie, les images picturales
Les troïkas, les violons et les balalaïkas.
Ah ! Natacha que faisais-tu là?
Je le savais, mais me taisais.
L'envie de t'aborder me démangeait
Autant d'ailleurs que mon adolescence
Qui attisait mes sens en effervescence
Inspiré par d'autres rivages inconnus
Par des amours inavouables
Des amours coupables
Un jour viendrait…. Peut-être…
Georgy Kurasov |
Ce jour, pourtant, n'est pas venu.
Du moins avant, que tu n'aies disparu.
Laissant dans ma mémoire
L'icône d'une princesse du trottoir,
Le souvenir d'un fruit défendu
Dans lequel je n'aurai jamais mordu.
Georgy Kurasov |
Aujourd'hui encore, s'il me vient à passer
À la croisée de mes jeunes années,
Au bas de la rue Lepic
Je cherche du regard ta frimousse angélique.
Je repense alors à cette époque de ma vie,
Où à l'écoute de mes envies
Torturé par mes étranges désirs,
J'attendais secrètement de goûter ce plaisir,
Que je ne découvrirai jamais dans tes draps.
Comme je t'enviais alors d'être dans les bras
De tous ces jeunes et vigoureux marins,
Moi qui attendais l'amour au masculin.
Ah ! Natacha ! Si tu savais
Ce que la vie me réservait…